Les abords du château de Saint-Germain-en-Laye bientôt défrichés dans le cadre d’un projet absurde ?

Château de Saint-Germain-en-Laye et sa perspective de l’avenue des Loges, partie intégrante du domaine national

Le STIF (syndicat des transports d’Île-de-France) prévoit, avec un financement de la région Île-de-France, de l’Etat et du département des Yvelines de construire deux voies ferrées dans la forêt domaniale de Saint-Germain-en-Laye, qui apparaissent non seulement très destructrices pour le patrimoine et l’environnement mais également absurdes au regard de la fréquentation attendue (le bilan socio-économique serait très négatif). Pourtant, le défrichement de la forêt (dont le classement en « forêt de protection » vient d’être écarté) et d’une partie du parc du château (site classé) serait imminent. Sites & Monuments a donc alerté la présidente du conseil régional, l’Etat et notamment écrit au ministre de l’Agriculture.

Liaison entre le chemin de fer de la Grande Ceinture (en orange) et le RER (en rouge) par création d’un tram-train (en jaune). Doc STIF

Le projet consiste dans une branche de la Tangentielle ouest (TGO) qui serait une double voie ferrée de 3,6 km traversant en surface la forêt domaniale de Saint-Germain afin de relier les gares de Saint-Germain Grande ceinture et du RER, pourtant distantes de moins de 2 km en ligne droite par la ville (voir illustration ci-dessous) ! Un tracé par la forêt domaniale paraît incompréhensible, sauf à considérer que celle-ci est « gratuite » ou que l’intention ultérieure est d’y construire, à l’emplacement du camp des Loges notamment. Un passage par les quartiers urbanisés aurait en outre l’avantage de desservir les habitants… Enfin, la connexion au RER A - motif affiché de ce « U » - serait plus efficace au nord (Poissy ou Achères), mais cette partie du projet (phase 2) a été séparée de la phase 1 et n’est jamais mentionnée… comme si le fait de la rappeler mettrait en évidence l’inutilité de la branche annoncée.

Liaison en « U » entre la future gare de la Grande Ceinture et la gare du RER A. Un passage du tram en ville, solution la plus courte et la plus utile pour les habitants, n’est pas envisagé. Doc STIF

La commission nationale des monuments historiques a examiné le projet (12 avril 2012), mais le STIF avait alors affirmé qu’il n’aurait « pas d’impact sur les alignements d’arbres ». En outre, le fait que la perspective des Loges est une œuvre de Le Nôtre était passé sous silence. Aujourd’hui, il apparaît que plus de 150 arbres seraient abattus le long de l’avenue des Loges (non protégée) ainsi que dans le parc du château (site classé) et plus de 2,5 ha de forêt défrichés.

De même, l’enquête publique (qui évoquait un « déboisement » dont l’Autorité environnementale a relevé qu’il s’agit en fait d’un « défrichement ») a porté sur un « tram » et un « tracé en milieu urbain ». Aujourd’hui, le projet est un train, avec caténaires et même grillages (contre les chevreuils et les sangliers).

Emplacement du défrichement nécessaire à la création du tram-train dans la forêt domaniale de Saint-Germain-en-Laye. Doc STIF

Lors de la seule réunion publique depuis l’enquête publique, le 26 septembre, les présents à l’hôtel de ville de Saint-Germain ont massivement exprimé leur incompréhension, voire leur opposition. La réponse des autorités a été que le projet avait fait l’objet d’une déclaration d’utilité publique (DUP)... Il reste à obtenir qu’un dialogue soit noué comme cela avait été le cas lorsqu’une autre DUP prévoyait une traversée de la forêt et de l’avenue des Loges par une A14 en surface. Cette autoroute a été finalement enterrée par décision du président de la République (lire le discours de François Mitterrand) à l’emplacement exact des voies ferrées projetées qui passeraient cette fois en surface.

Les alternatives au projet paraissent non seulement plus respectueuses du patrimoine et de l’environnement mais aussi moins coûteuses (le projet actuel coûterait plus de 140 M€ hors fonctionnement) : navettes bus électriques (et demain autonomes) utilisant la route (qui n’est pas encombrée), ou bien tram traversant le centre-ville, comme dans de nombreuses villes en France. Même si finalement des voies ferrées s’avéraient souhaitables, il conviendrait de réexaminer leur emplacement (par exemple au centre de la route actuelle, un des sens de la voie routière prenant place dans une des contre-allées sans destruction).

Aspect urbain du projet de passage en "U" du tram-train dans la forêt de Saint-Germain-en-Laye. Doc STIF

Le président de Sites & Monuments - première association nationale à s’être mobilisée (voir ici) - outre les nombreux courriers et courriels mentionnés ci-dessus, a cosigné une lettre avec trois associations locales (Yvelines environnementEPESG et ADURERA). Cette alerte doit aussi être l’occasion de prendre enfin des mesures de protection de la forêt domaniale de Saint-Germain, poumon vert rendu plus indispensable encore par la croissance de la population, mais qui a été victime ces dernières années de plusieurs atteintes dommageables. Ainsi, une parcelle de 6.000 m² a récemment été détruite (voir photo ci-dessous) pour permettre le chantier de l’opération immobilière de la "lisière Pereire" à proximité de la future station TGO Saint-Germain Grande Ceinture (voir film de présentation vantant sa connexion avec le tram-train, représenté bizarrement sans caténaires ni grillages...), projet intervenu après deux modifications successives du PLU en 4 ans, conduisant à relever de 50 % la hauteur initialement prévue des immeubles, qui domineront ainsi largement les arbres. Le ministère de l’Agriculture s’est borné à demander une « compensation » sous forme d’achat de bois existants, près d’une autre forêt. Ses services ont même proclamé dans le journal de la municipalité que l’échange rendu nécessaire était « bon pour la forêt ». La même année, une prairie de plus d’1 km de long a été bétonnée (voir photo ci-dessous) afin de créer une route pour bus (qui n’apparaît pas justifiée et doublonnerait avec le projet de train-tram).

Projet immobilier de la "lisière Pereire" desservi par le "tram-train". Voir le
Prairie bétonnée afin de créer une route pour bus

Il est surprenant que ce domaine forestier, fameux dans l’histoire, qui a été séparé du parc du château de Saint-Germain (site classé) en 1964 pour être confié à l’ONF, ne bénéficie pas du régime de la « forêt de protection », qui « interdit tout changement d’affectation ou tout mode d’occupation du sol de nature à compromettre la conservation ou la protection des boisements » (article L. 141-2 du code forestier), comme Fontainebleau, Rambouillet, Sénart, Fausses-Reposes et même récemment l’arc boisé du Val-de-Marne (voir la pétition). Il devra, au demeurant, en application de la loi "patrimoine", être considéré comme un domaine national intangible, statut auquel Sites & Monuments à beaucoup contribué...

L’avenue des Loges, principale perspective du château de Saint-Germain, aujourd’hui...
Annonce des travaux préparatoires

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