Des conséquences paysagères de l’éolien offshore sur la baie de Fécamp, les Petites Dalles et la côte d’Albâtre

Plage et falaises de la Petite Dalle. Photo Wikipédia commons.

L’association de protection du site des Petites Dalles est une association Loi 1901 dont l’objectif est la préservation du patrimoine architectural, de l’environnement naturel, de la flore et de la faune terrestre et marine. Elle mène toutes actions de nature à garantir la défense du site, la qualité de vie, l’amélioration de la sécurité et la prévention des risques d’accident et de pollution de la station balnéaire dont elle porte le nom. Elle œuvre depuis sa création pour conserver l’esthétique des abords de la plage et le respect des règles d’urbanisme. Mais elle lutte surtout, sans relâche, depuis sept ans, contre le projet titanesque d’aménagement d’un parc éolien en mer de Fécamp qui perdure malgré les dépôts de plaintes, les recours devant les tribunaux et la mobilisation active des association et des riverains de la côte d’Albâtre.

Parc éolien de Fécamp, situation en envergure du projet.

L’installation de 83 éoliennes d’une hauteur de 175 mètres sur une superficie de 65 km² (Paris s’étend sur 84 km² intra-muros), serait située à une distance de 13 kilomètres de Fécamp et à 14,9 kilomètres d’Étretat. Ces éoliennes seraient largement visibles des plages de la côte d’Albâtre, d’Étretat à Veulettes, et depuis les falaises dont chacun apprécie le caractère unique.

Futur parc éolien vu depuis Etretat (la Manneporte, distance 15,2 km). Consulter le 

Ce parc serait situé dans la zone des 12 miles de la côte, zone de pêche maîtrisée pour sauvegarder la ressource halieutique. Si ce projet se concrétise, il en résultera des conséquences majeures sur l’outil de travail des pêcheurs de Fécamp et sur le paysage exceptionnel des falaises du Pays de Caux apprécié par de très nombreux de touristes chaque année.

Projet éolien en mer de Fécamp. Le n° 37 correspond aux Petites Dalles ()

Est-il nécessaire de rappeler l’attachement à ces falaises des peintres, dont Claude Monet, Camille Pissaro, Eugène Delacroix, Charles Rey, qui les ont immortalisées et celle de si nombreux écrivains ?

La falaise d’amont par Claude Monet (1881)
Falaise des Petites Dalles par Claude Monet (1884)
Monet3 Falaise Aval
Pissaro Falaise aval
E. Delacroix la falaise des Petites Dalles
Peinture de Charles Rey 1875

Eugène Delacroix séjourna ainsi plusieurs étés dans l’ancienne Abbaye de Valmont, qui appartenait à ses cousins. L’artiste aimait « ce séjour de paix et d’oubli du monde entier ». Jusqu’en 1850, le peintre trouva dans les paysages verdoyants et les valleuses sauvages, de nombreux motifs d’inspiration pour ses œuvres.

Futur parc éolien vu depuis Les Petites Dalles (la plage, distance 19,5 km). Consulter le

La romancière Katherine Pancol dit à merveille l’attirance des artistes pour ces paysages maritimes singuliers : « Les Petites Dalles, c’est un trou de verdure dans la mer, une boutonnière de craie blanche au fond d’un vallon, une plage de galets ronds. On y entre sur la pointe des pieds comme par effraction et on se promet aussitôt de ne jamais prononcer ce nom à voix haute de peur d’attirer la convoitise de malfaisants.

Victor Hugo y a traîné ses guêtres, Berthe Morisot y a peint une première falaise, une deuxième, une troisième et Claude Monet aussitôt l’a imité.

Aujourd’hui, à New York, à Boston ou à Philadelphie, sur les murs des musées américains brille le blanc orangé et ocre des falaises dallaises que contemplent les Américains, ébahis par tant de beauté lumineuse.

Futur parc éolien vu depuis Yport (le Casino, distance 13,4km). Consulter le

Sacha Guitry a écrit sur les Petites Dalles, des dialogues étincelants, Sarah Bernhard en a martelé le sol de sa jambe en bois, Martine Carol y a promené ses décolletées en attendant Caroline chérie, Georges Perec y a joué au rami, Brigitte Bardot s’y est endormie, Jean Loup Sieff a mis dans son viseur les cabines blanches posées sur les galets, Charlotte Rampling a regardé le soleil se coucher sur la plage en fumant de longues cigarettes anglaises.

Toute la beauté du monde a traversé un jour ce village. Et on voudrait le saccager en posant à l’horizon des éoliennes presque aussi hautes que la Tour Eiffel ? Impossible : ce serait une faute de goût impardonnable. Victor, Sacha, Eugène, Sarah et tous les autres ne nous le pardonneraient pas et sortiraient de leur tombe en nous montrant du doigt !  » (Les Petites Dalles, le 15 mai 2013)

Futur parc éolien vu depuis Etretat (première plateforme panoramique, distance 15 km). Consulter le 

Quant au site d’Étretat, on ne compte plus ses admirateurs, écrivains ou peintres. Gustave Flaubert y fit « promener » Bouvard et Pécuchet dans les valleuses du littoral cauchois : « la falaise, perpendiculaire, toute blanche et rayée en noir, ça et là, par des lignes de silex, s’en allait vers l’horizon telle que la courbe d’un rempart ayant cinq lieues d’étendue. Un vent d’est, âpre et froid soufflait. Le ciel était gris, la mer verdâtre, comme enflée. Du sommet des roches, des oiseaux s’envolaient, tournoyaient, rentraient vite dans leurs trous. Quelquefois, une pierre se détachant, rebondissait de place en place, avant de descendre jusqu’à eux  ». Guy de Maupassant y fit construire sa maison, « la Guillette », et dépeignit ainsi la porte d’amont d’Étretat : « la petite porte d’Étretat a l’air, de loin, par les temps sombres qui la noircissent, d’un énorme éléphant qui boit dans la mer  » (lettre de Maupassant à Flaubert, 6 novembre 1877). Maurice Leblanc y vécut et y fit évoluer Arsène Lupin à la recherche du secret de « l’Aiguille creuse », Alfred Karr fit connaître la dure vie des marins d’Étretat par son livre L’histoire de Rose et Jean Duchemin...

La plage vers 1875, au centre avant la falaise, la villa Brise Lames de Henri Wallon

L’Association de protection du site des Petites Dalles, avec le soutien de Sites & Monuments, a attaqué successivement les deux autorisations accordées par le Préfet de Seine Maritime, d’abord devant la Cour d’appel de Nantes (seule instance habilitée à statuer en premier recours sur les éoliennes en mer), puis devant le Conseil d’Etat. Ces deux juridictions ont rejeté ces recours (voir ici).

Parallèlement, l’Association a déposé une plainte, notamment avec la FED et Sites & Monuments, devant la Commission européenne, invoquant l’illégalité des aides d’Etat accordées par la France à l’éolien en mer Voir ici

Futur parc éolien vu depuis Veulettes-sur-Mer (la falaise, distance 25 km). Eolien existant sur terre et parc projeté en mer, forme de double peine. Consulter le 

D’autres recours sont actuellement envisagés, tant sur le plan national que sur le plan européen. L’association se mobilise notamment dans le cadre du Document stratégique de façade maritime, récemment approuvé par le préfet de Seine-Maritime, qui prévoit de rajouter un quatrième parc éolien en Manche d’environ 300 km², qui pourrait être implanté dans le secteur de Fécamp. Voir ici

Les pêcheurs de Fécamp se sont joints à l’action de l’association dans sa lutte pour préserver l’avenir de la pêche dans le secteur. Voir ici

Futur parc éolien vu depuis Veulettes-sur-Mer (la plage, distance 24,1km). Consulter le

Nous nous devons de partager avec vous ce combat pour que cessent ces installations offshore qui dénaturent nos si beaux paysages côtiers.

Gérard Poirier, Président de l’Association de protection du site des Petites Dalles, adhérente de Sites & Monuments

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2, rue Joseph Heuzé 

76540 - Les Petites Dalles.